Le « Terrible Twenty-six ».
J'dois l'avouer, j'déteste vieillir.
J'trouve que vieillir ce n'est pas une partie de plaisir. Ou plutôt, ce n'est plus une partie de plaisir. Même que je dirais que vieillir c'est comme participer aux Hunger Games, parce qu'au fond, tu le sais que tu n'en sors jamais véritablement gagnant.
Sincèrement, je haïs ce mot.
Juste le fait d'y penser, j'ai envie d'aller me faire congeler comme le veut la rumeur de notre cher M. Disney.
Vieillir…
C'est un mot que l'on n'ose pas prononcer à haute voix : un peu comme celui dont on ne doit pas prononcer le nom dans la saga Harry Potter.
J'déteste avoir 26 ans.
En réalité, qui aime vraiment prononcer ce chiffre lorsque quelqu'un demande : « Hey t'as quel âge, toi? »
En toute honnêteté, que ceux qui aiment avoir ce chiffre comme âge lèvent la main!
…
…
C'est ce que j'disais!
Anyway, j'trouve qu'on parle trop de la mi- vingtaine, mais jamais de ce qui se passe juste après...
Le « Terrible Twenty-six ».
Le chiffre infernal.
Celui qui te fait pousser des cornes et sentir nostalgique jusqu'au bout des doigts.
Celui qui donne l'impression de revivre le fameux « Terrible Two ».
Sauf, que cette fois-ci, tu n'es pas en quête d'autonomie, mais plutôt en quête de la jeunesse éternelle.
Parce qu'avoir 26 ans, c'est l'équivalant de se faire dire : « Hey ma grande t'es maintenant plus proche de 30 ».
Ding ! Ding ! Ding !
Adieu belle peau de jeunesse et bonjour à toi, maudite crème antirides!
Dorénavant, le sablier est retourné.
À peine tu as le temps de te faire à l'idée que ta face se transforme en un raisin sec comme ceux dans les petites boîtes Sun-Maid, que tu te mets à remarquer d'énormes changements sur ton corps.
PILOSITÉ.
De la maudite pilosité.
De la foutue pilosité, et ce, à des endroits interdits.
Whaaatt?
J'sais pas pourquoi, mais j'aurais préféré apprendre au secondaire les inconvénients de la vieillesse au lieu d'apprendre à faire de la maudite pizza. T'sais, je n'ai jamais passé en commande un duvet (ou une moustache en bon français) à emporter. Avoir su, j'aurais fait une commande de cire à épiler à l'avance. Pis en plus d'arriver à l'improviste, ça vient en quantité illimitée comme du maudit pissenlit. Pis si t'as le malheur d'arracher un seul poil avec une pince à épiler, gare à toi,mon amie, tu risques de te faire appeler Frida Kahlo dans les jours qui suivent.
Et un beau matin, tu te lèves, te regardes dans la glace et remarques dans ta crinière, un joli reflet clair. Très clair. Tu vis un choc. Pas le genre de petit choc que tu as lorsque tu insères un doigt dans une prise électrique (par accident, on s'entend). C'est plus un choc comparable à si tu touches une clôture électrique de 2000 volts. Tu te ramasses avec les cheveux droits dans les airs comme Marvin Merchant dans Maman, j'ai raté l'avion. Pis là, quand tu touches à ton magnifique cheveu blanc, tu remarques que celui-ci n'a pas la même texture que les autres.
Whaaatt?
C'est un cheveu droit comme une barre, gros et ondulé qui dit : « Hey tout le monde, regardez-moiii !! »
Et puis, alors que tu croyais que le pire était arrivé, tu te rends compte que ce n'est plus seulement toi qui remarques que tu vieillis. Désormais, tous les commis de la SAQ savent que tu as l'âge infernal.
Tu attends à la caisse pour payer ta bouteille de Chardonnay. Oui, du Chardonnay, parce que maintenant, tu es assez mature pour boire du vin blanc. Tu n'es plus la petite fille de 16 ans et trois poils qui s'achetait de la Pabst Blue Ribbon au dépanneur du coin et qui avait toujours espoir de ne pas se faire demander une pièce d'identité. Les rôles sont inversés, parce qu'au fond de toi, tu voudrais dont bin que le petit commis te demande : « Mademoiselle, avez-vous une pièce d'identité? ». Mais, ça n'arrivera pas. Tout ce qu'il va faire, c'est te regarder droit dans les yeux et te dire le prix de la maudite bouteille.
Un pot de crème, un cheveu blanc et l'égo touché, tu te remets en question sur ta vie. Le genre d'interrogations que tu veux garder enfouit à double tour dans ton inconscient. Mais, parfois, ton cerveau se trouve bin drôle pis il prend la mauvaise décision de les ramener dans ton conscient.
Bien souvent, ces questions infernales tournent en boucle dans ta tête un peu comme une chanson énervante que tu as entendue à la radio et dont tu es incapable de te débarrasser. Tu passes la journée à la fredonner même si tu la détestes, parce qu’elle s’est imprégnée dans ton esprit.
T'sais, la maudite question : « est-ce que ma vie est à la hauteur de mes attentes? »
Celle-là, c'est réellement la pire, parce qu'on a tous des attentes envers nous-mêmes. On a tous un ou plusieurs projets que l'on veut entreprendre afin de se réaliser. Parfois, on se donne des dates limites à leur réalisation. On se met de la pression. Mais, il faut bien se rendre à l'évidence que plus que tu vieillis et plus que la vie passe en un éclair. Le temps s'accélère à chaque fois qu'une année s'ajoute à notre banque de vie. C'est pourquoi il est normal que tous les projets qu'on se fixe ne soient pas nécessairement réalisés en un claquement de doigts.
Il faut être patient.
Se laisser du temps.
Respecter son rythme.
Apprendre à accepter.
C'est en acceptant que tu peux enfin lâcher-prise.
Et s'est avec le lâcher-prise que tout s'enfile et que tu peux enfin voir l'aspect positif du mot dont il ne faut pas prononcer à haute voix.
Parce que même si notre corps vieillit, reste tout de même que nous avons la chance d'acquérir les outils qui permettent de grandir et d’évoluer, et ce, au fur et à mesure que le temps avance. On pourrait aussi appeler ça : la sagesse.
Aujourd'hui, j'comprends mieux la petite phrase quétaine que mes parents me disaient dans le temps : « l'âge, ce n'est qu'un chiffre, parce qu'au fond, l'important, c'est d'garder son cœur jeune; c'est ça qui fait de nous, d'éternels enfants ».
– Gabrielle