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La maudite « game ».

Vendredi soir. Ou plutôt, ce qu'il en reste, puisque les aiguilles de ma montre indiquent maintenant 1h37 du matin.

Même si mes yeux commencent à être dans le même trou, j’te remarque, toi, le gars de l’autre côté du bar.

T’es là, avec ta gang de boys à boire pis à danser sur You & Me de Disclosure. T’as d’l’air pas mal drunk.

J’ris en te voyant fermer les yeux et former avec ta bouche un genre de « cul-de-poule » ; après que tu aies enfilé une coupe de shots de Téquila.

Tu remarques que j’me moque de toi ou de la grimace que tu viens d’faire, mettons.

Tu viens vers moi.

Tu marches tout croche, mais ce n’est pas grave, parce que moi aussi, j’ai un problème de coordination avec mes jambes à l'heure qu'il est.

Tu m’demandes si j’veux un verre.

On en prend un, puis deux, puis trois…

Tu payes la facture pis on décide de foutre le camp, nous, les désaccordés.

On prend la décision d’aller chez moi, mais finalement, on va chez toi, vu que c’est plus proche.

Le lendemain, on échange nos numéros de téléphone, on s’ajoute sur Facebook et on s’dit qu’on va se redonner des nouvelles au courant de la semaine.

Puis… passe 2-3 jours et je n’ai aucun signe de toi. J’peux pas vraiment t’en vouloir, parce que moi aussi, j'te donne aucun pouls : moi aussi, j’ai décidé de jouer à la maudite game.

J’veux pas t’écrire en premier, parce que j’me dis que j’vais passer pour la fille facile, la fille dépendante affective, la fille qui trippe trop. J’me dis que c’est toi le gars, alors ça doit être toi qui me réécris en premier. Mais, au fond d'moi, j’sais bin que ça ne fonctionne pas comme ça.

Puis… passe 5-6 jours et toujours aucune nouvelle. J’vois que tu es connecté à Facebook, mais moi, j’ai droit à aucune connexion. J’me dis que tu vas surement finir pas m’écrire, que tu dois être simplement occupé…

Mais… non, tu ne le feras pas. Tu ne le feras pas, parce que toi aussi, tu joues à la maudite game.

On joue aux indépendants, on joue à faire semblant. On joue la comédie, parce que c’est ce que la société nous a enseigné.

On est 2 players, qui, au bout du compte, finiront par être game over.

On a décidé de garder nos centaines de barrières, nos dizaines de masques : par peur d’être mis à nu.

Au final, on a laissé tomber.

Aucun de nous deux n’a fait le premier pas. C’était beaucoup plus simple d’abandonner que de piler sur notre saleté d’orgueil.

Qui sait, peut-être on a passé à côté d’une belle histoire...

Mais... tous les deux, on ne le saura jamais, parce que tous les deux, on a décidé de jouer à la maudite game.

– Gabrielle